La nouvelle loi, quels changements pour les immigrés ?

Quelles nouvelles autorisations de séjour et de travail pour diverses professions en France ? Et pourquoi la loi risque-t-elle de se durcir vis-à-vis l’expulsion des étrangers ?

La version définitive du projet de loi sur l’immigration a été publié ce mercredi 21 décembre 2022. Le gouvernement français l’a envoyé, lundi 19 décembre 2022, au Conseil d’État. Selon media, le texte prévoit de faciliter l’expulsion des étrangers en situation irrégulière, notamment de ceux qui présentent une menace contre l’ordre public. En parallèle, le gouvernement entend instaurer de nouvelles cartes de séjour, notamment pour les métiers dites en tension et les médecins étrangers.

« Pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration » : le titre résume à lui seul la volonté d’afficher un projet équilibré sur ce sujet très clivant, autour duquel le gouvernement doit trouver une majorité, – déclare l’Ouest France.  -Parmi les mesures phares figure la création d’un titre de séjour « métiers en tension » , pour les secteurs qui manquent de main-d’œuvre, comme le bâtiment et le médico-social. Le texte en précise les contours : d’une validité d’un an, il doit entrer en vigueur « à titre expérimental » jusqu’au 31 décembre 2026, après quoi un bilan sera transmis au Parlement ».

Voyons plus concrètement ce que contient cette loi.

Métiers en tension, une carte spéciale de séjour

Intégration des étrangers, respect des lois françaises, accès au travail facilité dans les secteurs en tension : tels sont, selon le media français, les trois piliers du projet de loi sur l’immigration que le gouvernement entend faire voter début 2023 au Parlement. Dans un entretien au Figaro publié mardi, les ministres de l’Intérieur et du Travail, Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, ont présenté les grandes lignes du texte. Devant être présenté en Conseil des ministres en janvier avant d’être examiné au Sénat puis à l’Assemblée nationale, il a fait l’objet de nombreuses concertations en cette fin d’année.

« Le gouvernement a proposé la création d’une carte de séjour pour les métiers dits en tension. Valable un an, elle concernerait tout étranger sans papiers qui vit depuis au moins trois ans en France, qui peut fournir 8 bulletins de salaire sur les 24 derniers mois et qui travaille bien dans un secteur où l’on manque de main d’œuvre. L’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques) a publié en novembre une liste de 30 métiers tendus, où figurent les activités liées au bâtiment, mais aussi les métiers d’assistant à domicile, de boucher, de plombier et d’agent immobilier », -explique la radio RTL.

Aujourd’hui, en vertu de la circulaire Valls, des sans-papiers peuvent déjà être régularisés s’ils travaillent, mais il faut que leur employeur accepte de lancer les démarches et ce sont les préfectures qui ont le dernier mot. « Avec cette nouvelle loi, le travailleur en situation irrégulière ne serait plus soumis au bon vouloir des uns et des autres. Les personnes concernées devront également avoir validé des épreuves de vérification de leurs connaissances. Enfin, l’Agence régionale de santé devra donner son accord », – ajoute la radio.

Cette mesure « concernera quelques milliers de personnes par an. Donc on n’est pas du tout dans la régularisation massive », a déclaré Olivier Dussopt, en réponse aux craintes d’un « appel d’air » exprimées par Les Républicains (LR) et par le Rassemblement national (RN), premier groupe d’opposition à l’Assemblée nationale où le gouvernement n’a qu’une majorité relative.

Une carte spéciale de séjour pour les soignants

Selon La Croix, ce projet de loi prévoit notamment la création d’une carte de séjour pour les professionnels de santé. Eux ainsi que leurs familles, pourraient résider en France d’un à quatre ans, à condition d’avoir été recrutés par un établissement de santé public ou privé à but non lucratif.

Il s’agit d’une toute nouvelle carte de séjour pluriannuelle destinée aux soignants.  Dénommée « Talent – professions médicales et de pharmacie », elle concerne les médecins « quelle que soit leur spécialité », les sage-femmes, les chirurgiens-dentistes et les pharmaciens, précise le texte. Selon son article 7, cette carte est destinée aux professionnels de santé et à leurs familles « dès lors qu’ils sont recrutés par un établissement de santé public ou privé à but non lucratif ». Le texte prévoit de conditionner la délivrance du titre à une autorisation de l’agence régionale de santé. Sa durée de validité, d’un à quatre ans, dépendra de la validation par le praticien des « EVC » (épreuves de vérification des connaissances).

« Ce titre vise à répondre au besoin de recrutement de personnels qualifiés de santé », notamment car ces praticiens étrangers ne peuvent pas toujours être embauchés à l’heure actuelle, « faute de titre de séjour répondant pleinement à la spécificité de ces situations », justifie l’exécutif.

Le projet de loi est en cours d’examen par le Conseil d’État, pour avis (sollicité le 20 décembre 2022).
mi-janvier 2023 : présentation du projet de loi en Conseil des ministres
mi-janvier/février 2023 : examen du projet de loi par le Sénat (première lecture)
mars/avril 2023 : examen du projet de loi par l’Assemblée Nationale (première lecture)

De mesures pour faciliter les expulsions

Mais la création de nouveaux titres de séjour n’est qu’une partie et le côté “soft” de ce projet de loi. « Comme indiqué depuis plusieurs mois, le projet de loi vise surtout à favoriser les expulsions, notamment par une réforme « structurelle » du droit d’asile et du contentieux des étrangers », -explique Ouest France.

L’article 9 vise notamment à « faciliter les expulsions des étrangers ne respectant pas les valeurs de la République et commettant des infractions sur le territoire national », et l’article 10 à « réduire le champ des protections contre les décisions » d’OQTF en cas de faits commis « constituant une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’État ».

Le gouvernement a réintroduit une mesure de la loi séparatisme initialement censurée par le Conseil constitutionnel en 2021, selon Ouest France, pour « rendre possible le refus, le retrait ou le non-renouvellement de certains titres de séjour » en cas de non-respect des « principes de la République », dont l’égalité femmes-hommes, la liberté d’orientation sexuelle, des symboles de la République, ou encore « en cas de menace grave pour l’ordre public », souligne le texte.

Le projet de loi rétablit en outre la « double peine », la possibilité d’expulser des étrangers condamnés à des peines d’au moins dix ans de prison – cinq ans en cas de récidive. Sous réserves de l’appréciation des circonstances relatives à la vie privée et familiale des intéressés et que leur pays d’origine accepte de les reprendre. Ainsi, toute personne éloignée sur la base d’une OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français » ne pourra pas demander de visa pendant cinq ans (article 18).

Selon plusieurs médias français, d’une manière générale, « le gouvernement veut simplifier les types de procédures et réduire les délais de contestation et de jugement ». Pour déclarer leur opposition au projet et réclamer des droits pour les sans-papiers, des milliers de personnes ont manifesté dimanche à Paris. Cette marche était organisée à l’occasion de la Journée internationale des migrants, chaque 18 décembre. Les participants se trouvaient derrière la banderole de tête proclamant « D’où que l’on vienne, où que l’on soit né(e), notre pays s’appelle solidarité », avec parmi eux des sans-papiers et des militants répondant à l’appel de plusieurs collectifs, d’associations d’aide ou encore de syndicats (CGT et Solidaires).

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